C’est un spectacle déroutant à bien des égards auquel j’ai assisté à l’Auditorium de Seynod.
J’ai eu le privilège de découvrir la dernière création d’Yves Mwamba, Ce qu’il me reste.
À travers ce spectacle, l’espace d’une soirée, j’ai voyagé en République démocratique du Congo, plongé dans la musique traditionnelle des Baluba, une ethnie issue de la province congolaise du Kasaï, pour y découvrir le Mutuashi..
Qu’est-ce que le Mutuashi ?
la sortie du spectacle, un technicien de la salle me demande si cela m’a plu.
Je ne crois pas qu’Yves Mwamba cherche à plaire avec cette proposition.
Il ne cherche pas à séduire.
Il se livre, simplement — brut, sincère, désarmant.
Sur scène, il dépose son être, son ressenti, sans artifice, sans masque.
Et c’est à nous, spectateurs, d’accueillir ce don.
À ses côtés, sa mère.
Sa voix porte les chants traditionnels du Congo, berceaux d’un héritage qu’il honore.
Mutuashi raconte l’histoire d’une filiation et d’un ancrage pour mieux s’émanciper.
Dans ce duo mère-fils, Yves Mwamba propose un voyage à partir de la danse du Mutuashi.
Ce dialogue intime fait surgir, sous le feu des projecteurs, ces mouvements qui portent la mémoire de son pays — et plus largement celle du continent africain.
Car ce qu’il nous reste, c’est le Mutuashi, cette danse ancestrale qui traverse le temps, les corps et les mémoires.
Le mot « mutuashi » signifie « mettez-le à l’épreuve » en tshiluba, la langue parlée au Kasaï.
À l’origine, le Mutuashi était pratiqué en pleine forêt par des sorciers et féticheurs : seuls les hanches bougeaient, le reste du corps restait immobile — puis venaient les « combats de danse » où l’on invoquait les esprits.
Yves Mwamba la ranime, la fait vibrer, entre images enregistrées et transes en direct.
Il convoque les ancêtres, entre en dialogue avec eux.
Et nous, nous regardons. Fascinés. Parfois déroutés.
Une expérience déroutante et nécessaire
e suis dérouté parce que je n’ai pas les codes culturels.
Mais peut-être que c’est justement cela, le propos : ne pas comprendre, juste recevoir.
Avoir le privilège d’être témoin d’une transmission, d’un héritage.
La culture, c’est une rencontre.
Et ce soir, j’ai voyagé loin.
J’ai plongé dans un monde inconnu, vibrant d’authenticité.
Un monde qui demande qu’on s’y abandonne, qu’on accepte l’inconfort, qu’on ouvre les yeux et le cœur.
Ce qu’il nous reste, à tous, c’est le respect —
le respect de la différence, de la sincérité, du geste vrai.
Merci, Yves Mwamba, pour cette traversée.
Merci de m’avoir permis, le temps d’un spectacle, de regarder autrement.
Un mot sur l’auditorium de Seynod
Il faut saluer également la programmation de l’Auditorium de Seynod qui, à travers ce genre de spectacle, réaffirme son rôle essentiel de lieu de diffusion artistique ouvert sur le monde.
Un espace qui œuvre à faire découvrir des œuvres singulières et exigeantes, tout en donnant la parole à la diversité des cultures et aux voix du monde.




